Établissements verts Brundtland 

 

J. Robitaille, en collab. avec L. Pettigrew

Un mouvement unique visant à éduquer à l’avenir viable en milieu scolaire québécois

Résumé
Comment l’éducation peut-elle contribuer au développement durable ? Et surtout, comment faire en sorte que le respect des autres et l’engagement en faveur d’un monde meilleur deviennent pour les jeunes des valeurs incontournables ? Ces questions, la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) et son mouvement des Établissements verts Brundtland (EVB) se les posent et y apportent des réponses depuis plus de quinze ans.

Fondé en 1993 par la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), en partenariat avec RECYC QUÉBEC, le mouvement Établissements verts Brundtland (EVB) s’inspire du rapport Brundtland, Notre avenir à tous (1988),. Les préoccupations environnementales et sociales sont au cœur de la réflexion et de l’action de ce mouvement qui incite à la construction d’un monde meilleur à travers un ensemble de petits gestes continus. Actuellement, quelque 1 100 établissements EVB se sont dotés d’un projet éducatif qui prône les valeurs propres à l’éducation pour un avenir viable, soit :

  • d’écologie ;
  • de pacifisme ;
  • de solidarité ;
  • et de démocratie ;

Dans les établissements EVB évoluent des jeunes et des adultes engagés dans divers projets au sein de leur classe, leur établissement, leur communauté et dans le monde. Ces projets vont du compostage à la collecte de fonds en passant par l’apprentissage de la coopération, la solidarité avec les jeunes du monde et bien d’autres. Les projets sont élaborés en fonction des valeurs ci-dessus présentées. L’exemple de l’école Saint-Cœur de Marie (Alma) illustre concrètement la dynamique et la forme d’un projet (voir l'encadré ci-dessous).

EVB: Une invitation… saisie par l’école Maria (Alma, Québec)
Par Céline Duval, enseignante à l’école primaire de Maria (Alma, Québec)

Depuis 2000, les valeurs du mouvement EVB sont devenues

à l’école Maria une philosophie de vie, intégrées au projet éducatif. Une philosophie partagée par toute une équipe, où tous les enseignants promeuvent l’éducation de tous pour un avenir plus viable, année après année, à l’intérieur de leur tâche éducative.

 

Le personnel et les élèves de l’école Maria se retrouvent autour d’un projet commun où sont posés des gestes concrets afin de contribuer à la construction d’un monde plus écologique, pacifique, solidaire et démocratique : d’encre, petits pots de nourriture pour bébé ; les lunettes et casquettes ramassées sont envoyées dans les pays en voie de développement. Le papier recyclé est transformé en petits calepins. Les enseignants boivent du café équitable et l’usage des verres en styromousse est banni. Nous soulignons avec emphase le jour de la terre et nous organisons des petites conférences sur des sujets d’actualité : les changements climatiques, l’énergie, l’eau, les enfants esclaves dans les plantations de cacao, la boîte à lunch écologique, etc.

  • Démocratie. Élection d’un conseil d’élèves qui coordonne la vie étudiante et choisit le thème de l’année. En 2008, c’est : Engages-toi pour ta planète.
  • Solidarité. À l’Halloween, les élèves participent à la campagne de Leucan. À Noël, nous préparons des paniers de denrées non périssables pour les plus démunis. La solidarité entre les élèves se vit également par le tutorat. Par exemple, les élèves de 5e année donnent une dictée personnalisée aux élèves de 2e année, les 6e année aident les 1ère année en lecture. À chaque année, nous accueillons une stagiaire Katimavik.
  • Pacifisme. Tout au long de l’année, les élèves apprennent àgérer leurs conflits d’une façon pacifique grâce au programme Vers le Pacifique. Dans la cour de récréation, ils sont aidés par des jeunes formés à la médiation. La journée de la Paix et la Saint-Valentin sont devenues la fête de l’amitié.
  • Écologie. Nous recyclons le papier, les berlingots de lait, plastiques, piles, cartouches

 

L’éducation à un monde vert et solidaire se fait donc autant dans la classe que dans l’organisation de la vie étudiante et la vie de l’école en général.

Pour appuyer leurs actions, les établissements disposent de formation, de matériel pédagogique et de proposition d’activités dont plusieurs sont élaborées avec des partenaires privilégiés des EVB comme Oxfam Québec/CLUB 2/3 et avec des collaborateurs comme Amnistie internationale, Cyclo Nord-Sud, etc.

Comment une centrale syndicale (CSQ) en est-elle venue à créer cet intérêt auprès de plus de 1 000 écoles ?

En plus de la défense de la vie professionnelle des membres, la mission de cette organisation est aussi la promotion d’une société plus équitable et plus démocratique.

Historiquement, on peut observer que, depuis les années 1970, la CSQ a mené de nombreuses interventions pédagogiques. À travers la pédagogie de la conscientisation, qui propose l’observation, l’analyse et la transformation de la réalité, les cahiers pédagogiques de la CSQ (disponibles au Centre de documentation de la CSQ à Québec) ont contribué à informer et à former le personnel de l’éducation sur des thèmes comme les droits humains, la paix ou la coopération internationale.

Dès 1988, le lancement d’une campagne éducative sur les enjeux du développement durable

Dès 1988, dans la foulée de la publication du rapport Brundtland, la CSQ a invité des représentants de 24 groupes préoccupés d’éducation à l’environnement et au développement durable à contribuer à la réalisation de l’opération Ensemble, récupérons notre planète. Cette campagne éducative visait à aborder les enjeux du développement durable en classe ainsi qu’à reconnaître et à appuyer le travail de pionniers du personnel de l’éducation qui intégrait déjà ces enjeux à leur pratique éducative.

Elle allait ensuite favoriser l’émergence, en 1989, d’un comité environnemental formé de responsables locaux de la CSQ préoccupés par les questions soulevées par le rapport Brundtland. Se rencontrant trois fois par année à l’occasion de sessions nationales, les membres du comité ont pu bénéficier de formations ainsi que d’ateliers de réflexion et d’échanges tant sur les thématiques soulevées dans le document Ensemble, récupérons notre planète que sur les pratiques éducatives développées. De retour dans leur milieu respectif, les membres du comité transmettaient les informations reçues à leurs collègues.

Peu à peu, divers établissements ont développé une expertise particulière, mettant en place un programme de récupération et de recyclage des matières résiduelles, réalisant avec les élèves des activités de sensibilisation sur l’environnement, la paix, le racisme, le désarmement, les autochtones ou la solidarité internationale.

En 1992, la CSQ proposait à ses membres, partenaires et collaborateurs une idée qui allait faire son chemin : reconnaître socialement et valoriser le travail réalisé par les jeunes et les adultes qui les accompagnent en créant le statut ainsi que le concept d’Établissement vert Brundtland (EVB).

Comment un établissement scolaire peut-il obtenir le statut Établissement vert Brundtland ?

Pour accéder au mouvement et obtenir le statut EVB, chaque établissement doit démontrer qu’il a réalisé au cours d’une année au moins deux actions assurant la continuité de son engagement au sein du mouvement EVB, telle l’intégration des valeurs EVB au projet éducatif, la mise en place d’un comité au sein de l’établissement ainsi qu’au moins une action dans les quatre catégories suivantes :

  • au sein de la classe par la réalisation d’activités pédagogiques en Éducation pour un avenir viable (EAV) ;
  • au sein de l’école par une campagne de sensibilisation sur l’environnement ;
  • au sein de la communauté par une opération de nettoyage des berges d’une rivière ;
  • et enfin, à l’échelle internationale, par une collecte de fonds pour soutenir un projet de coopération internationale.

Qu’est-ce que le laboratoire de pratiques pédagogiques ?

En 1993, le mouvement EVB voyait officiellement le jour. Depuis ce temps, les EVB constituent un véritable laboratoire dans lequel tant les responsables du mouvement que ses membres font évoluer la réflexion et la pratique de l’EAV. Afin de rendre le discours EVB plus accessible aux jeunes et guider l’action éducative, le mouvement EVB traduit dans un slogan les valeurs qui l’animent. Être EVB, c’est lutter pour un monde écologique, pacifique, solidaire et démocratique.

Depuis l’an 2000, le mouvement EVB anime une opération d’EAV à quatre volets : la campagne Construire une citoyenneté responsable. Le premier volet, Tirer le diable par la queue !, aborde les causes, les conséquences et les moyens de lutter contre la pauvreté. L’opération D’un commerce agréable… et équitable traite de l’impact de nos modes de consommation sur l’environnement et le développement des sociétés. La trousse éducative La Terre dans votre assiette offre une réflexion sur l’impact de nos modes de production alimentaire. Finalement, le volet S’investir dans nos communautés… en citoyen du monde, lancé en 2005, favorise chez les jeunes le développement d’une citoyenneté responsable. Ces documents sont-ils sur votre site?

Enfin, le mouvement EVB tient depuis quatre ans un rassemblement annuel : le Carrefour de la citoyenneté responsable. Cet événement national, ouvert à l’ensemble de la communauté éducative, propose aux jeunes et aux adultes des activités de formation tout en permettant aux jeunes de présenter publiquement les projets d’engagement réalisés en cours d’année. Le Carrefour de la citoyenneté responsable a été reconnu par la Commission canadienne pour les Nations Unies comme élément phare de la Décennie des Nations Unies sur l’éducation en vue du développement durable à l’échelle québécoise.

Rêver et agir pour un monde meilleur : un slogan porteur

Dans un monde où il est plus facile d’être spectateur qu’acteur, l’action des EVB vise à accorder aux jeunes le droit de rêver à un monde meilleur et à contrer les sentiments d’impuissance et de défaitisme qui sont souvent source de violence. Elle vise enfin à transmettre aux jeunes la conviction que chaque geste, si petit soit-il, peut contribuer à l’avènement de ce monde meilleur, un monde écologique, pacifique, solidaire et démocratique.

Que retenir ?

  • Avec le temps, le mouvement s’est accru et consolidé ;
  • aujourd’hui, plus de 1 100 établissements (liste disponible sur le site des EVB), principalement dans le milieu de l’éducation, revendiquent justement le statut d'EVB.

Comment citer ce texte ?

J.ROBITAILLE, J., et L., PETTIGREW. (2008). « Le mouvement pédagogique des établissements verts Brundtland. Un mouvement unique visant à éduquer à l’avenir viable en milieu scolaire québécois ». Dans GAGNON, C. (Éd) et E., ARTH (en collab. avec). Guide québécois pour des Agendas 21e siècle locaux : applications territoriales de développement durable viable [En ligne] http://www.demarchesterritorialesdedeveloppementdurable.org/9703_fr.html (page consultée le jour mois année).

Pour aller plus loin...

Établissement vert Brundtland (EVB)
Centrale des syndicats du Québec (CSQ)

Dernière modification: 10 juin 2014

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