Foz do Iguaçu (Paraná, Brésil)

 

Présentation des caractéristiques de la ville et de son développement

Au sud du Brésil, la ville de Foz do Iguaçu comprend 250 918 habitants (2010), répartis sur un territoire de 5 579 km². Elle se situe dans une région frontalière avec l’Argentine et le Paraguay. C’est la cinquième plus grande ville de l’État du Paraná et la douzième de toute la région Sud-Est du pays (carte 1).

Entre 1970 et 1980, il y a eu un boom démographique (augmentation de 100 000 habitants), économique et commercial, à cause de l’arrivée d’un grand nombre de travailleurs, soit 40 000. Ces derniers sont venus pour construire le plus gros barrage au monde, soit celui d’Itaipu (14 000 mégawatts). Ces travailleurs migrants étaient en majorité des hommes sans famille. Entre 1980 et 1990, l’activité commerciale de cette région transfrontalière, notamment avec le Paraguay où il y a une sorte de zone franche, a été le principal moteur de l’activité économique locale. Mais peu à peu, la vocation touristique de Foz do Iguaçu s’est développée grâce à ses chutes d’eau, les plus grandes au monde. Les chutes d'eau de « Cataratas do Rio Iguaçu » au parc national et d’«Itaipu Binacional» au barrage hydroélectrique sont aujourd'hui perçues comme des attractions touristiques. Le Parc des Chutes d'Iguaçu reçoit de nombreux visiteurs de partout dans le monde à chaque année (près de 1,5 millions de visiteurs en 2010). Néanmoins, à partir de 1995, l’activité commerciale frontalière connaît une baisse significative, aggravant ainsi le chômage et la pauvreté à Foz do Iguaçu (il y a 56 « favelas » malgré un PIB local de 850 millions de réals, soit l’équivalent de 450 millions de $ CDN). De ce fait, la ville a connu une augmentation des activités illicites et de contrebande. Entre 1980 et 2005, la population a continué d’augmenter : elle a doublé passant de 136 320 habitants à 279 620 habitants, ce qui représente aujourd'hui, un défi de taille.

Une des caractéristiques de ce territoire concerne la cohabitation d’un grand nombre de groupes ethniques, soixante cinq, incluant ceux d’autres pays. Il en résulte un manque de sentiment d’identité et d’appartenance territoriales. Cela s'explique par le fait que les migrants/immigrants sont d’abord venus pour des raisons économiques. Il y aurait donc peu de sensibilité quant aux problématiques sociales et environnementales dans la communauté.

Carte 1 - Localisation de Foz de Iguaçu, Paraná, Brésil

Présentation du projet de Foz do Iguaçu

Au Brésil, l’Agenda 21 (A21) fait partie d’une politique publique nationale. Il y a un A21 brésilien national bien défini, un A21 pour chaque État (province) et cent cinquante trois Agendas 21e siècle locaux (A21L) répartis dans 5 grandes régions. Fait intéressant, ces Agendas 21ème siècle locaux sont regroupés dans un réseau national afin de leur permettre d’échanger sur les pratiques, les outils, les difficultés et la formation. L’A21L de l’État du Paraná est bien développé et des ressources sont consacrées afin d’appuyer et d’y promouvoir notamment les A21L à l’échelle des collectivités territoriales. Fin 2005, Foz do Iguaçu, qui est une des grandes villes de cet État du sud, a commencé une démarche d’A21L. Compte tenu de sa vocation touristique et écotouristique, de sa situation géographique frontalière et des problèmes qui en découlent ainsi que de la présence de nombreuses municipalités voisines du lac réservoir alimentant le barrage d’Itaipu, l’A21L a été perçu comme une démarche qui pouvait stimuler le développement local et améliorer les conditions de vie. La démarche A21L a débuté, par décret, le 24 octobre 2003.

L’idée de cette fiche sur le cas brésilien de l'A21L de Foz do Iguaçu est survenue suite à la visite du professeur Christiane Gagnon de l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC), à l’automne 2006. Cette dernière a été orientée vers cette municipalité, celle-ci étant considérée comme la plus avancée dans la mise en œuvre d’un A21L dans l’État du Paraná. Quatre entrevues ont été réalisées au cours de ce séjour. C’est principalement celle du 30 octobre, avec des responsables de la démarche de l’Agenda 21 à la Ville de Foz de Iguaçu, qui a inspiré le présent contenu.

La municipalité de Foz do Iguaçu comprend deux cent quatre vingt quatre arrondissements (quartiers) et douze régions sociopolitico-administratives. Ellepossède un plan directeur en révision (2006). Afin de faciliter le travail du secrétariat exécutif A21L, le territoire a été divisé en cinq régions :

  • Porto Meira ;
  • Três Lagoas ;
  • Morumbi ;
  • Vila ;
  • Centro.

Chacune de ces régions compte plusieurs arrondissements. Pour la mise en œuvre de l’A21L, il a d’abord été prévu que l’ensemble de la collectivité soit mobilisée par étape et par région : pour chaque région, une pré-conférence et, à la fin, une conférence municipale définissant le plan d’action de l'A21L. Cela reprend le modèle national.


© Christiane Gagnon, 2007

 

Motivation et initiatives

Les projets de protection du bois Ciliar ou forêt Ripária à Foz do Iguaçu

Le bois Ciliar ou Forêt Ripária est une formation végétale le long des cours d’eau dont la présence est liée à des conditions physico-chimiques, dont une humidité du sol plus élevée. La protection du bois ciliar est une initiative de reforestation, le long des fleuves, des lacs, des courants, des ravins et des sources d’eau. L’objectif est de protéger les sources et les cours d’eau ainsi que la faune aquatique, en évitant l’érosion et la pollution des berges, le bois agissant plus ou moins comme un filtre des agents polluants. Les forêts de bois Ripária sont désormais préservées depuis la création du code forestier, suite à la Loi 4.771 de 1965.

Cet écosystème occupe une grande importance dans la gestion environnementale : il contribue à la qualité des ressources hydriques; il fonctionne comme un couloir humide entre les secteurs agricoles; il favorise la protection de la faune sauvage. Il existe des projets gouvernementaux visant la récupération du bois ciliar qui intègrent quatre composantes :

  • gestion partagée ;
  • assistance technique et qualification ;
  • encouragement ,
  • contrôle et surveillance.

Bien qu’il y ait au Brésil une certaine demande de la société civile organisée pour l’A21L, l’initiative part davantage du gouvernement central national qui encourage les municipalités à légiférer à ce sujet ; Brasilia a aussi fortement incité les institutions d’enseignement supérieur, à savoir les universités, à soutenir, avec leurs moyens, l’implantation des A21L.

Ainsi, la municipalité urbaine de Foz do Iguaçu a décrété, en 2003, un programme A21L. Mais la mobilisation n’y est pas aisée. Bien que les communautés dans les quartiers se mobilisent régulièrement pour des améliorations par rapport à leur qualité de vie, telle que la protection du bois Ciliar ou des forêt de Ripária, l’A21L reste un sujet nouveau et peu connu. À l’heure actuelle, il répond davantage à une politique publique dictée par le haut qu’à une mobilisation citoyenne.

Par exemple, à Foz do Iguaçu, la création d’un comité A21L pour le Forum, réalisée en octobre 2005, s’est faite sur la base d’invitations lancées, par courrier et téléphone, à tous les secrétariats de la Préfecture pour qu’ils nomment deux membres les représentant. La coordination du Forum A21L était sous la responsabilité du secrétariat de l’Environnement de la Ville.

En mars 2006, soit 6 mois plus tard, la tenue du premier Forum A21L a eu lieu. Près de 100 personnes y ont participé : des représentants des groupes sociaux, des secrétariats de la préfecture, des organismes non gouvernementaux (ONG), des universités, des écoles, des instituts et des entreprises. Le secrétariat de l’Environnement avait invité toute la communauté, au moyen d’affiches, d'action de porte à porte, de courrier et des médias. Les partenaires institutionnels ont été les ONG écologistes, comme ECOLOGUS, l’Association de défense et d’éducation environnementale de Foz do Iguaçu (ADEAFI) et la VIDA AZUL, l’Association commerciale de Foz do Iguaçu (ACIFI), les Facultés de l’Université puplique de l’Ouest de Paraná (UNIOESTE), ainsi que Itaipu Binational (compagnie d’électricité). C’est toutefois le secteur environnemental qui a été le plus représenté d’un point de vue quantitatif. Un décret municipal a finalement établi officiellement la composition du Forum A21L en juin 2006.

Structure de travail

Le signal de départ de l’A21L s’est fait de façon légale en 2003, mais pas par la diffusion d'une intention politique claire. C’est le secrétariat de l’Environnement qui en est responsable, plus spécifiquement, l’équipe de l’éducation à l’environnement de la Ville qui assume la logistique. Mais il faudra attendre 2006 pour que les travaux démarrent avec la tenue du Forum. Un Secrétariat exécutif a alors été créé, composé des représentants de la préfecture, d’un conseiller municipal et de cinq représentants de la société civile, à savoir des ONG, des universités et des écoles publiques.

La fonction du Secrétariat exécutif est de transmettre les informations à la centaine de participants du Forum, afin de dynamiser la communication, de planifier des actions, des réunions et de transmettre les informations nécessaires aux travaux des sous-groupes (voir point suivant). Le Secrétariat exécutif travaille en partenariat avec d’autres secrétariats municipaux, dont Rio + 15 et Eco-Foz 2007, qui ont aussi l’A21L dans leur mire. Toutefois, ils n’ont pas de budget spécifique pour ce nouveau programme. La réglementation interne (statuts et règlements) prévoit un changement dans la coordination de l’A21L tous les deux ans.

Séquence de travail et approches de mobilisation

Lors de la tenue du Forum le 6 mars 2006, toute la société civile fut invitée à participer à une rencontre pour identifier des problématiques de développement durable (DD) et former des sous-groupes de travail. Une des façons utilisée pour informer la communauté de cette activité a été l’école : les élèves apportaient des invitations à leurs parents. Ensuite, des invitations et des brochures ont été laissées dans les commerces afin d’inviter les gens à participer. Ce travail d’animation sociale a été réalisé par les fonctionnaires de la Ville, mais aussi par des bénévoles en collaboration avec les partenaires. Cinq thèmes ont été retenus pour former les sous-groupes de travail :

  • tourisme soutenable ;
  • agriculture soutenable ;
  • gestion des ressources naturelles ;
  • réduction des inégalités sociales ;
  • villes soutenables et infrastructures.

Ces thèmes ont été choisis comme étant les plus pertinents compte tenu de la problématique de DD de ce territoire et de ces caractéristiques, notemment la pauvreté, la croissance rapide de la population due principalement à la construction d’un mégaprojet industriel et/ou du commerce avec le Paraguay, le manque de formation de la population. Ces thèmes devaient servir de base de discussion, dans chaque arrondissement lors des préconférences, mais à terme, une seule préconférence s’est tenue, celle de l’arrondissement de Trois Lagunes, à la fin 2006.

Finalement, comme la participation a été bien en dessous des attentes, le Secrétariat exécutif a modifiée son mode de travail. Dans un premier temps, l’équipe de coordination a rédigé un diagnostic des actions positives de la municipalité afin de le présenter à la communauté, tout en étant à l’écoute de la population. Le diagnostic met l’accent sur les éléments positifs existant sur des projets en cours et,met le moins d'accent possible sur les aspects négatifs. Par exemple, pour le thème de l’agriculture durable, le représentant du Secrétariat municipal concerné a apporté des données et ensuite le groupe de travail a formulé des propositions pour que l’administration publique améliore le secteur.

Dans un deuxième temps, chaque groupe de travail thématique expose la problématique spécifique. Pour la pré-conférence, les inscriptions quant aux divers sujets sont faites d’avance selon un nombre déterminé de participants. Par exemple, pour le groupe sur l’agriculture soutenable, les participants répondent aux questions suivantes :

  • qu’est-ce que l’arrondissement (quartier) a fait de positif pour l’agriculture ? ;
  • qu’est-ce qui peut être amélioré ? ;
  • de quelle façon ?

Les suggestions de la population ainsi que les obstacles à leur réalisation sont identifiés dans le document final. Ainsi l’approche a été repensée afin de travailler d’abord à la qualification des participants du Forum A21L et des groupes de travail, soit environ 120 personnes. Il est prévu de revenir dans la communauté en 2007, sous forme de préconférences, mais seulement pour les cinq régions identifiées à l’intérieur du périmètre du territoire municipal (voir point précédent). Lors de la conférence finale, les délégués du forum analyseront les recommandations des préconférences et homologueront le plan d’action A21L.

Résultats, difficultés et défis

© Christiane Gagnon, 2007

À ce stade-ci de la démarche d’implantation d’un A21L dans la ville brésilienne de Foz do Iguaçu, nous notons un certain nombre de résultats positifs mais aussi des difficultés et des écueils. À ce jour, il n’y a pas de plan d’action car la démarche est à un stade initial.

Du côté des résultats positifs, bien que la volonté politique ne soit pas encore très affirmée et que les élus désignés sur la table de travail ne soient pas trop présents, le plan "Pluriannuel" de la ville et le budget municipal 2007 prévoient des ressources financières pour appuyer la démarche. L’autre aspect positif concerne la concertation : il y a eu une union dans les efforts des institutions, un travail collectif ainsi que des liens plus étroits avec la municipalité. Avec la création récente des cinq groupes thématiques de travail, une plus grande participation, voire adhésion des personnes à la démarche s’est produite. Enfin, lors des rencontres de travail, les groupes thématiques ont développé des compétences afin d’interagir avec les citoyens et les fonctionnaires de la Ville.

Du côté des difficultés rencontrées à ce jour, l’inertie politique est un obstacle majeur : les élus ne savent pas quelle sera la contribution d’un A21L au développement local et régional. Conséquemment, ils ne sont pas convaincus de son intérêt. Entre 2003, soit l’adoption de la Loi municipale créant l’A21L, et fin 2005, il ne s’est pratiquement rien passé! Ce qui a entraîné une démotivation tant chez les fonctionnaires municipaux que chez les participants ou les personnes intéressées par la démarche. Lorsque le décret a été signé par le maire et que les responsables politiques ont été identifiés, le groupe s’est restructuré à nouveau. Comme de nouvelles personnes se sont jointes, il a été nécessaire de renouveller l’information et la formation, ce qui a nuit à l’efficacité des groupes de travail et à l’avancement de la démarche.

Le manque de participation citoyenne, lors des deux premières invitations ouvertes, et l’absence de représentants institutionnels constituent des obstacles à la réussite de l’A21L. En outre, comme il n’y a pas de ressources financières pour l’A21L, compter sur le seul travail des bénévoles pour faire avancer une démarche globale et complexe devient un écueil sérieux. Alors, même si, en principe, une enveloppe spécifique est prévue au budget 2007 (entrevue avec le maire); viendra-t-elle appuyer de façon concrète le travail des bénévoles? Sans aucune ressource matérielle additionnelle, il apparaît difficile pour les fonctionnaires et les citoyens de réussir une telle démarche dans une ville d’importance comme Foz do Iguaçu.

Une autre difficulté concerne l’évaluation et le suivi. Dans les groupes de travail, il n’existe rien à cet effet et une formation à ce sujet semble être souhaitée. Les personnes interviewées, dans le cadre de la rédaction de cette fiche, affirment ne pas avoir suffisamment d’informations pour participer activement et de façon éclairée à la construction de l’A21L. Elles disent ne pas connaître la démarche dans son ensemble et les prochaines étapes prévues, même si celles-ci doivent diffuser « la bonne nouvelle », agir comme agent multiplicateur auprès la population en général. De même, les ONGs et les institutions n’ont pas démarré de réflexion ou de travaux concernant l’A21L car, pour l’instant, il reste trop de questions et d’interrogations.

Enfin, il y a un manque de volonté politique et de soutien pour les bénévoles, mais tout de même l'A21L avance. Aussi, il y a un manque d’information et d’intérêt par rapport à A21L crée de nombreuses incertitudes quant au développement et à la matérialisation de cette politique publique, soutenue par les gouvernements fédéral et provincial. C’est pourquoi l’information venant des expériences d'A21L des autres villes brésiliennes ou des autres pays, semble la bienvenue.

Comment citer ce texte ?

DE CERQUEIRA VIOLANTE, A. et C., GAGNON. (2007). « L’Agenda 21e siècle local de Foz do Iguaçu. Une démarche de démarrage issue d’une politique nationale ». Dans GAGNON, C. (Éd) et E., ARTH (en collab. avec). Guide québécois pour des Agendas 21e siècle locaux : applications territoriales de développement durable viable, [En ligne] http://www.demarchesterritorialesdedeveloppementdurable.org/9554_fr.html (page consultée le jour mois année).

Sites Internet

Site de la Ville de Foz do Iguaçu

Dernière modification: 11 septembre 2013