La structure de travail

 

Le rôle et les défis du comité A21

Résumé
Mettre en place un Agenda 21e siècle local (A21L) nécessite un effort important sur plusieurs mois, voire des années, ce qui suppose la coopération de plusieurs acteurs au sein d’une structure de travail dont l’épicentre est le comité A21.

De qui a-t-on besoin pour mettre en oeuvre un Agenda 21e siècle local ?

La mise en œuvre d’un Agenda 21e siècle local (A21L) est l’affaire de toute une communauté. Mais, au départ, deux équipes de travail s’affairent :

  • le comité A21 ou comité de parrainage ou de pilotage, entité principale de la démarche, (il y a parfois deux comités porteurs comme le montre les exemples de Lavaltrie et de la MRC des Sources) ; et
  • une équipe de soutien formée d’experts, d’élus, de gestionnaires municipaux, d’universitaires et/ou de toute autre ressource agissant sur le territoire et qui peut apporter une expertise, tel un animateur communautaire d’un centre local de services sociaux (CLSS).

Mais comme cette démarche met en scène toute une communauté, la figure ci-dessous (figure 1) n’est qu’une représentation possible de la structure de travail et de coopération des acteurs, structure à adapter selon les caractéristiques de chaque communauté.

Figure 1 : schéma de la structure de travail d'un A21L

Quel est le rôle du comité A21 ?

Le comité A21 est l’unité centrale de travail de la démarche. Il :

  • coordonne l’ensemble des actions de la démarche ;
  • facilite le rayonnement de la démarche dans la communauté par ses activités de communication, c’est-à-dire le partage d’informations dans les deux sens : le comité renseigne d’une part la communauté sur ses activités et, d’autre part, fait émerger avec la communauté, un savoir et des aspirations collectives.

En d’autres termes, le comité A21 est un :

  • visionnaire, car il dresse un portrait de ce que pourrait devenir la communauté d’après ses potentiels et ses aspirations ;
  • organisateur, car il planifie et coordonne l’ensemble des activités ;
  • mobilisateur, car il souleve l’enthousiasme des citoyens et des acteurs locaux ;
  • communicateur, car il anime et facilite les échanges entre les différents acteurs locaux ;
  • démocrate, car il fonctionne le plus possible par débat puis consensus ;
  • rassembleur, car il favorise l’intérêt de la communauté dans son ensemble.

Le mandat et les tâches du comité A21

Le mandat du comité ou des comités peut varier d’une collectivité territoriale à l’autre. Mais, de façon générale, son mandat consiste à orienter la démarche de façon à ce qu’elle aboutisse au plan d’action ou d’intervention ou à une planification territoriale du développement durable (DD). Les tâches des membres du comité A21 sont au nombre de sept :

  • apprendre et renforcer leurs compétences collectives concernant l’application territoriale du DD ;
  • partager le plus possible les connaissances et les compétences acquises avec les élus locaux, les acteurs territoriaux et les citoyens ;
  • coordonner et analyser le diagnostic territorial ou l’état des lieux en matière de DD et en diffuser les résultats. Cet état des lieux est réalisé, en tout ou en partie, avec la collaboration d’experts, provenant soit du milieu communautaire, institutionnel ou universitaire ;
  • rédiger ou participer à la rédaction d’une vision de DD à l’aide d’une démarche de participation citoyenne et institutionnelle ;
  • construire ou participer à l’élaboration des objectifs, des orientations et actions du plan d'action A21L à l’aide d’une approche de participation citoyenne ;
  • assurer la mise en œuvre du plan d’action et sa validation politique ;
  • évaluer et faire un suivi de la démarche globale.

Comment former le comité A21 ?

La formation du comité A21 est une étape cruciale pour assurer le succès de la démarche. En se référant à l’expérience québécoise des A21L, trois méthodes peuvent être utilisées:

  • la délégation ;
  • l’appel à tous ;
  • l’invitation ciblée.

Pour chacune de ces méthodes, des avantages et des inconvénients ont été identifiés (tableau 1). Il est possible d’adopter une méthode hybride de formation du comité. Par exemple, lors d’un appel à tous (publicité écrite distribuée à chaque maison et annoncée dans les lieux publics), il est aussi possible d’inviter des organismes afin de s’assurer que les acteurs territoriaux soient représentés. Un critère important est sans doute que les personnes les plus motivées et les plus disponibles (il s’agit souvent de bénévolat), ayant un leadership naturel, soient présentes, selon un mode de représentation (voir paragraphe suivant).

Tableau 1 : Méthodes de formation du comité A21

Mode Avantages Inconvénients
Délégation
représentation selon les associations locales existantes
  • présence d'acteurs influents de la communauté et d'associations actives
  • implication parfois restreinte des délégués qui travaillent souvent sur plusieurs mandats et ne sont pas poussées par leur motivation intrinsèque ;
  • liberté de prise de position et d’action parfois limitée ou retardée par l’organisation d’appartenance ;
  • manque d'ouverture et de participation
Appel à tous
invitations ouvertes à tous
  • participation de personnes dont la motivation est forte et directement reliée au DD de leur communauté ;
  • ouverture à la participation citoyenne ;
  • faiblesse de la représentativité par rapport à certains groupes ou enjeux ;
  • force du réseautage existant peu utilisée
Invitation ciblée
les promoteurs ciblent plusieurs personnes intéressantes et les invitent à se joindre au comité tout en tenant compte d’une représentativité selon la composition sociale de la communauté
  • force du réseautage ;
  • présence de personnes dont la motivation est marquée et dont le leadership est reconnu par les pairs.
  • moins démocratique et moins ouverte ;
  • risque d’influence politique ou d’élimination de personnes qui sont perçues comme des opposants (innovateurs ?) ;
  • moins grand brassage d’idées lorsque les personnes invitées se limitent aux « toujours les mêmes ».

La formation du comité A21 implique aussi une représentation soit territoriale (quartier, rang, secteur géographique, municiplaité, etc.) ou thématique ou les deux, et cela en tenant compte aussi de la répartitaion selon l'âge et le genre. Pour être efficace, le comité ou les comités comprennent idéalement de 6 à 12 personnes qui pourraient se répartir comme suit :

  • un élu municipal de la collectivité ;
  • un membre s’impliquant en développement social ;
  • un membre proche du milieu des entreprises ;
  • un membre engagé envers la protection de l’environnement ;
  • un membre proche du milieu de l’éducation ;
  • un membre du milieu de la santé ;
  • un membre impliqué dans le milieu culturel et artistique ;
  • des membres qui peuvent représenter certains secteurs thématiques (jeunes, aînés, sports et loisirs).

Les sept défis pour que le comité A21 soit mieux adapté aux objectifs de l’Agenda 21e siècle local

Pour que le travail du comité A21 soit mieux adapté aux objectifs généraux de l’A21L, sept défis sont identifiés.

1. Relever le défi de l’hétérogénéité lors de la formation du comité

Il est tentant de choisir des gens déjà connus avec qui les initiateurs de la démarche se sentent à l’aise de travailler. Toutefois, la démarche A21L consiste justement à favoriser l’implication de tous et le changement ainsi que d’intégrer des préoccupations citoyennes et des acteurs qui ne se trouvent pas dans le cercle des gens influents dans le milieu municipal. Ainsi des personnes en dehors des réseaux formels déjà établis peuvent être ciblées pour se présenter à une rencontre publique, soit à partir du répertoire d’organismes du CLD ou de la Ville ou selon une méthode de remue-méninges.

Les questions suivantes peuvent aider le remue-méninges :

  • Qui s’est impliqué bénévolement dans l’organisation du dernier festival d’été ? ;
  • Qui assiste aux séances du Conseil municipal ? ;
  • Qui écrit des lettres d’opinion au bulletin local ? ;
  • Qui participe et amène des idées lors des consultations publiques ?
  • etc.

En cours de route, des formations courtes et adaptées pour les membres du comité A21 ont parfois lieu, selon les besoins et les demandes, ce qui permet d’adopter un même vocabulaire et une compréhension commune de la problématique du développement du territoire.

2. Aller au-delà des rôles consultatif et critique des décideurs en place

Dans ce type de démarche, des membres du comité peuvent interpréter leur rôle comme en étant un de conseiller ou de critique envers les instances municipales administratives et territoriales. Pour éviter une polarisation/division des forces ou encore une bataille politique, il est important que le mandat et les tâches du comité A21 soient bien définis au départ, tout en mettant en évidence le rôle de coordonnateur, de rassembleur et de mobilisateur du comité.

3. Vaincre la résistance au changement

Une démarche A21L en est une de changement à la fois dans le mode de gouvernance et dans les valeurs. Or, le changement dérange. Le changement demande de l’énergie, des ressources et présente certains risques et opportunités.

Par exemple, en ayant pour objectif de devenir un centre reconnu en biotechnologie ou de réduire la pauvreté, cela induit à la fois un changement (attribution des ressources par exemple) et des opportunités pour certains membres ou organismes de la communauté. Ainsi, suite à l’adoption d’un plan d’action A21L, la planification triennale et le budget de la collectivité territoriale pourront être modifiés.

De même l’atteinte des objectifs du DD implique des changements dans les modes de vie, de production et de consommation ainsi que dans l’aménagement et la gestion du territoire. Ainsi, un des défis du comité A21 est de se pencher sur la question du changement et de sa résistance dans la communauté et dans les lieux décisionnels, et ce, afin d’identifier les résistances et les porteurs de ces résistances, les convaincre et les soutenir dans la mise en œuvre des changements.

4. La concertation à l’intérieur du comité

La concertation ne va pas de soi, car elle implique respect, compréhension et compromis. Pour relever ce défi, l’adoption d’une charte de principes de concertation peut aider à se fixer des balises à l’intérieur du comité (Deschênes, 2000). Déjà, le fait que des personnes, qui proviennent d’horizons différents et qui ne partagent pas le même vocabulaire, en arrivent à travailler ensemble constitue une avancée positive. Les échanges en dehors du comité A21 sont souhaitables à la condition qu’elles n’orientent ni l’essence des discussions, ni les prises de décision à venir .

5. Garder l’intérêt des membres du comité A21

L’essoufflement des bénévoles est une préoccupation constante. Il est utile de prévoir à l’avance une durée pour l’ensemble de la démarche et de s’y tenir autant que possible. Cela suppose une révision régulière de la planification du travail avant les rencontres. Un mandat limité dans le temps pour les membres du comité A21 peut éviter l’essoufflement et le désintérêt. Après cette période, ils pourront renouveler leur engagement ou laisser place à la relève. La fréquence des rencontres est aussi un facteur d’intérêt. Par exemple, une fréquence insuffisante ou irrégulière des rencontres peut entraîner un désintérêt. Nous avons observé qu’une moyenne de deux rencontres par mois semble satisfaisante. Mais il peut aussi arriver que certaines étapes requièrent l’accélération du travail.

6. Écourter les discussions qui s’éternisent

Il arrive aussi que certaines discussions s’éternisent et piétinent, que les idées s’embrouillent et qu’il soit difficile, à plusieurs, selon l’expression de points de vue différents, de prendre une décision sur l’orientation de la démarche ou encore sur la rédaction d’un document. Cela peut même parfois créer de l’impatience ou une démotivation chez les membres. Mais ces aller-retours sont partie intégrante de la construction démocratique. C’est un processus d’apprentissage collectif qui prend souvent du temps. L’adoption par les membres du comité d’un mécanisme de prise de décision (au consensus, à l’unanimité, au vote), dès les premières rencontres, est utile.

Pour amoindrir ou contrer un effet démobilisateur, une préparation détaillée des rencontres est aidante : ordre du jour planifié, documents de travail à l’appui, documentation des avantages et désavantages des scénarios proposées par l’équipe de soutien.

7. Réussir à pérenniser la démarche

Le premier cycle d’une démarche A21L est essoufflant, éreintant même. Si le premier plan d’action A21L est adopté sans qu’on ait pensé aux cycles subséquents de la démarche, ceux-ci risquent fort de se voir retarder, voire mis de côté. Il serait judicieux de présenter, en même temps que le plan A21L, une proposition de fonctionnement pour les prochaines étapes de l’A21L :

  • Quelle sera la nouvelle structure de travail ?
  • Comment sera intégré le plan dans la gestion municipale ?
  • De quel financement aura besoin le soutien de la démarche ?
  • Qui fera partie du suivi ?
  • Comment se fera le suivi et l’évaluation ?

Quelles ressources pour le fonctionnement du comité ?

  • Des ressources humaines et matérielles sont nécessaires. Elles font partie des conditions pour la réussite d’un A21L :
  • un chargé de projet à temps plein pour les grandes collectivités et à temps partiel pour les petites et moyennes ;
  • des ressources humaines qui peuvent être puisées dans le bassin de compétence existant à l’échelle territoriale : des organisateurs communautaires du Centre local de santé et services sociaux (CLSC), des bénévoles des associations locales, des professeurs ou jeunes des écoles, notamment ceux des écoles Brundtland (qui ont déjà un projet éducatif orienté sur le DD), des experts des organismes privés (entreprises), publics (ministères), parapublics (ex. Hydro-Québec), universitaires, collégiales, etc.
  • Un financement adéquat pour appuyer le travail du comité ;

Que retenir ?

  • La capacité de réflexion et de travail d’un comité A21 est structurant pour le succès d’un A21L. Hétérogène et hésitant au départ, le comité A21 développe, au fil des mois, une dynamique qui lui est propre et qui lui permet de travailler, en concertation et synergie, de manière créative et productive ;
  • la mise en œuvre du comité A21 suppose un décloisonnement sectoriel dans la façon de penser et faire du développement local, endogène, viable, territorial, durable ;
  • en bout de piste, tant individuellement que collectivement, les participants apprennent, créent des ponts, partagent un même diagnostic (qu’est-ce qui fait problème ?), une même vision, des préoccupations, voire des actions pour le bien-être de l’ensemble de la communauté. Ils deviennent ainsi les hauts-parleurs, les multiplicateurs d’un plan d’action intégrant l’environnement, l’économie, l’environnement et la gouvernance ;
  • par ce travail collectif, autour d’un projet commun et d'une vision partagée du territoire, le sentiment d’appartenance se renforce, un historique de travail en commun se tisse et vient actualiser l’empowerment de la communauté afin de mener à bien un changement de gouvernance territoriale, plus respectueux des capacités écologiques et sociales.

Les comités A21 dans les A21L québécois

  • L’A21L de Lavaltrie (Québec)
  • L’A21L d’Estran 21 (Québec)
  • L’A21L de Saint-Félicien (Québec)
  • L’A21L de Sorel-Tracy (Québec)
  • L’A21L de Baie-Saint-Paul (Québec)
  • L’A21L de la MRC des Sources (Québec)

L'auteur tient à remercier Christiane Gagnon pour sa collaboration

Comment citer ce texte ?

BRASSARD, A. (2007) « La structure de travail d’un Agenda 21e siècle local. Le rôle et les défis du comité A21 ». Dans GAGNON, C. (Éd) et E., ARTH (en collab. avec). Guide québécois pour des Agendas 21e siècle locaux : applications territoriales de développement durable viable, [En ligne] http://www.demarchesterritorialesdedeveloppementdurable.org/9575_fr.html (page consultée le jour mois année).

Pour aller plus loin...

DESCHÊNES, P. (2000). Guide d’une démarche pratique de concertation; à l’usage de partenaires engagés dans un projet partagé de développement local et régional, document non publié, 10 pages.

En complément

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Dernière modification: 23 février 2015